Kurt Cobain ou l’art de se vêtir avec ce qu’on a sous la main

Kurt est né en 1967 dans le nord-ouest des États-Unis, il a pas un sou, et là-bas il fait super froid. Il s’habille avec des frusques pas chères trouvées dans les friperies ou dans la rue. Et il superpose : t-shirt de couleur sur sous-pull à manches longues, sous chemise à carreaux et cardigan de grand père bien lâche en sus. Car le layering – dixit les magazines de mode en 2016 (car oui c’est tendance cet hiver de superposer) – ça permet d’avoir chaud ! Bravo pour l’épiphanot !!

Le shampoing ? Trop cher, Kurt se lave les cheveux avec une savonnette ; ce qui lui donne ce célèbre look capillaire graisseux et filasse !

Cobain est la figure de proue du grunge, un mouvement musical et vestimentaire, qui naît dans les années 80 et qui n’est pas caractérisé par sa joie de vivre ! C’est plutôt la méga déprime, le grunge… celle des jeunes (de ce qu’on appelle la génération X) désillusionnés face à la précarité du monde du travail dans une société ultra consumériste.

Le grunge comme style vestimentaire, c’est d’abord un refus de la mode comme symbole de séduction et de consommation.

Une ANTI-MODE un peu désespérée, qui mélange les genres en prenant ce qu’elle a sous la main et qui refuse les notions d’élégance et de séduction…

C’est surtout un moyen de s’habiller avec peu d’argent, en récupérant, détournant, recyclant. Jean-Paul Gaultier dira à Vogue en 1993 que le grunge n’est rien de plus qu’une façon de s’habiller quand on n’a pas d’argent.

Ce qui compte, ce n’est pas les vêtements qui sont portés, mais comment ils sont portés, superposés… On n’est pas loin du cool !!

Kurt Cobain se trouve trop maigre et n’arrive pas à prendre du poids. Les superpositions de vêtements sont un bon moyen de cacher son corps. Par la même occasion, elles brouillent la différentiation des genres en donnant une allure androgyne. D’ailleurs Kurt aime s’amuser avec les genres. Il porte parfois un manteau en léopard et des robes à fleurs de baby-doll. Sans-doute des pieds de nez aux hiérarchies de genre, au machisme, à l’homophobie…

Mais la suite de l’histoire est connue… L’anti-mode va devenir mode et être récupérée par la haute couture et le prêt à porter. Marc Jacobs intitulera sa collection Grunge en 1993. On verra poindre des revivals par la suite (2009, 2016).

Le grunge va également donner naissance au courant « chic héroïne ». Attention ici héroïne = drogue et non le féminin de héros. Il s’agit une représentation affectée du vestiaire des toxicos qui est popularisée par certains photographes de mode comme Davide Sorrenti. On la retrouve notamment dans une campagne de pub de Calvin Klein avec Kate Moss en 1993 : peau blafarde, silhouette émaciée, cernes de malades, rouge à lèvres sombre, l’air défoncé… Heureusement ça ne va pas durer. La mort par overdose de Davide Sorrenti va calmer les ardeurs des Larry Clark de la photographie de mode !

Au fait grunge en anglais, ça veut dire saleté…

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